samedi 8 mai 2010

pas de titre

I-Départs.
1. La porte.

Rage ou Tristesse? Le père est parti, laissant la mère pleurant dans le séjour. Mère psychorigide en conflit perpétuel avec le père artiste. Maintenant l'Artiste semble avoir fuit. Fuit pour de bon. Alex soupira, bascula la tête en arrière et examina le ciel à travers la fenêtre, le ciel à l'envers. Les arbres prenaient racines à leurs cimes tandis que les HLM voisins, au second plan, semblaient léviter dans un rose orangé. Il se racla la gorge que l'angoisse avait asséchée. Boire? Sortir de sa chambre ne lui semblait pas être chose envisageable dans l'immédiat. Alors il attendait passait sa main dans sa chevelure blonde, puis soupirait encore, puis ferma les yeux, puis pensa. Il songeait à son anniversaire: quel cadeau fantastique la Psychorigide et l'Artiste venaient-ils de lui offrir!Cependant, il n'en voulait pas à l'Artiste. Fallait-il alors en vouloir à la Psychorigide? Il y réfléchi, mais ça n'aurait pas été chose raisonnable. Enfin, il mit Rage de côté et se livra désarmé à Tristesse.

Fallait-il pleurer dans ces moments? La larme ne semblait pourtant pas venir, rien ne semblait venir, sinon peut-être ce «rien». Un vide plus vacant encore que le vide naturel qui habitait Alex depuis toujours. Ce vide grandissant, prenant trop de place, il ouvrit brusquement ses yeux. Il se racla la gorge. Sèche. Boire? Et si, en fion de compte, sortir semblait devenir chose envisageable? La Psychorigide était en bas, la salle de bain au bout du couloir. Il n'y avait pas à descendre après tout. Il bascula paresseusement de sa position allongée à une position assise, soupira, passait sa main dans sa chevelure blonde. Ils scruta le mur à travers la chambre, le mur à l'endroit. La poignée s'allongeait vers la moquette et était enceinte d'une serrure; à moins que ça ne soit la porte qui ne soit enceinte de la poignée? Sottise, elle n'était pas assez centré, de tout façon. Et puis, cette porte ne semblait pas léviter. Il regardait cette porte à l'endroit qui répondais trop bien aux lois de la gravité pour être honnête.

La porte lui parla. Elle émit en effet de petits sons secs et brefs. Alex fronça les sourcils. La porte se mit ensuite à l'appeler d'une voix incertaine et haletante. Il la regarda, indécis, et se décida enfin à lui répondre, par un « Oui? » hésitant. C'est ainsi que la porte demanda si elle pouvait entrer dans sa chambre. Avions déjà entendu auparavant chose si absurde? Une porte qui demandait à entrer? Qui plus est, une porte à l'endroit. Alex resta un moment, sans bouger interdit, mais se persuada bien vite que la porte pouvait bien entrer, si ça lui plaisait; qu'elle n'y était pour rien dans le départ de l'Artiste et que, peut-être, elle en était elle-même attristée. Il fixa cette porte droit dans la serrure, cette porte qui, bien qu'étant à l'endroit, était audacieuse, et l'invita très poliment à entrer.

La poignée en enceinte se tordit le cou, la porte oscilla, oscilla, oscilla. Elle oscilla jusqu'à toucher le mur, mais ne s'en détacha pas.

Gaël entra, interrogea son grand frère du regard. Alex, assis, interrogea son petit frère du regard. Gaël inspira, ouvrit lentement la bouche- le mot n'était pas loin- mais celle-ci se tordit, se crispa en une disgracieuse grimace et un hoquet bruyant, gras en sorti. Quelques larmes vinrent arroser ses jouent et se réfugier au creux des fossettes de l'enfant. Joues bien irritée, rougeoyantes de l'irrigation lacrymale qu'elles avaient déjà subie. La bouche d'enfant demanda finalement pourquoi «Papa» était parti. Alex haussa les épaule, répondit que c'était des affaires de grandes personnes, qu'ils le reverraient bientôt. Il ouvrit largement ses bras de grand frère et invita Gaël à s'y blottir. Tandis qu'il enlaçait l'enfant il regarda la porte et songea que, définitivement, elle serait bien mieux à l'endroit.

2. Crépuscule

Rage ou Tristesse? La Bestiole est partie, laissant vacante sa place de guide au près de la Fillette. La Fillette était assise par terre, au milieu de sa chambre et contemplait le soleil. Quand le soleil serait mort, elle serait dans le noir. Elle serait dans le noir pour de bon. Elle était assise en tailleur, la posture droite, soufflait calmement. La crise n'était pas loin, il s'agissait de se calmer. Alors, elle se leva et avec une lenteur infinie se dirigea vers son bureau. Elle ouvrit grand la fenêtre et monta sur ce dernier, écrasant livres et cahiers. Debout sur son plan de travail, elle lançait des regards incertains, regardait le jardin qui s'étalait en bas. Les balançoire, les bouleaux aux longues et souples branches et, immédiatement sous la fenêtre, la terrasse. C'était une belle et solide terrasse, une terrasse au marbre froid d'un rose tendre, bien que salit par l'hiver et défraîchi par le temps. Un rose parfait, un rose attirant mais sobre, qui contrasterait parfaitement avec du rouge. Oui, le rouge ruisselant ajouterai un second jeu de marbrure à ces dalles fatiguée, un jeu de marbrure grandiose. Elle mit une jambe sur le radiateur, posa ses mains sur le rebord de la fenêtre et se pencha. Le toit s'offrait maintenant à elle. Bien que très pentu, il n'en ferait pas moins un toboggan fantastique, Pourquoi ne pas faire du toboggan avant d'aller décorer la terrasse? Elle prit appui sur la jambe qui se trouvait sur le radiateur et amena la seconde sur cet ardent perchoir par une vive impulsion. Elle fit un demi tour, faisant dos aux bouleaux, toboggans et terrasses. Elle s'assit enfin, en travers de l'enchevêtrure de la fenêtre, tournant son buste côté jardin, gardant les jambes à l'intérieur.

Telle était la position des grands soirs de déprime. La Fillette sourit. La Fillette pleura, tout en gardant le sourire. De ses yeux embués elle examina le ciel. Crépuscule de fin d'hiver annonçant les prémices d'un printemps naissant. L'indigo profond oppressait, écrasait le rose orangé agonisant dans lequel se découpaient les infâmes silhouettes de la ville.

Tout était fugace. Ce qu'on a pu posséder un jour, on le perdait le lendemain,. C'était ainsi, et tout allait ainsi. La Bestiole était partie, partie sans laisser le moindre choix. Elle était venue, lui avait dit qu'elle lui parlait pour lui faire ses adieux, lui signifiait qu'elle l'effaçait. Comme toujours, la raison était floue. D'ailleurs, la Fillette aurait parié que la Bestiole n'en avait pas. Elle avait dû faire ça dans le but la blesser et, dans sa propre fureur auto-destructrice, se blesser elle-même, afin de jouir d'une plaie nouvelle. La Fillette réfléchit ainsi un long moment, jusqu'à ce que le froid ne la rattrape.

L'indigo avait une fois de plus gagné. Mais ce crépuscule était prometteur. La nuit promet l'aube. Et la Fillette ne savait pas pourquoi, cependant elle sentait que ce crépuscule annonçait la fin de l'hiver, les prémices du printemps naissant.